Covid-19 : Patville Le Feuilleton | Chapitre 24 | Le sermon

Patville Le Feuilleton, un journal fiction, écrit par Yves Carchon, en temps de la pandémie du coronavirus Un nouveau chapitre à suivre, tous les vendredis. Dernier chapitre !

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Patville, Journal en temps de coronavirus

Chapitre 24 : Le sermon

A Patville, beaucoup de choses avaient changé en l’espace d’un an. On devait bien le constater. Pour Jim et moi, c’était une évidence. La grande inondation avait donné naissance à de nouvelles maisons dans la grande rue.

Certaines façades avaient été repeintes à neuf dans les rues latérales. Des magasins de fringues avaient ouvert ; une coopérative de produits agricoles avait été créée, sous l’impulsion de Jo Cushing. On parlait même d’aménager la place du village pour y installer un ciné en plein d’air.

Dans la tannerie, l’activité avait repris, vu l’odeur répandue dans les rues, les jours où dévalait sur nos maisons le vent des Terres Hautes. Un vent qui se levait d’un coup, pour s’arrêter le lendemain comme il était venu.

A l’opposé de l’autre qui se pointait en cavalant du fin fond du désert, aussi fou qu’un mustang, et qui soufflait des jours durant, à t’oppresser les tempes. Mais avec lui et ses sautes furieuses, on oubliait au moins la tannerie !

Sauf nous, qui ne manquions jamais d’y faire un saut pour bavarder avec Paco. C’était peut-être le sang indien ruisselant dans mes veines qui me poussait à lui parler ; encore que Jim, n’ayant que du sang blanc, cherchât aussi sa compagnie. Peut-être que c’était justement cette autre face de l’Amérique qu’il pouvait seul nous raconter qui nous charmait, l’Histoire américaine vue du côté indien, en somme. Nous passions, il est vrai, moins de moments dans le bureau de Jeff, l’arrestation d’Allan Reno ayant fait de Collins un shérif respecté, ce qui comblait Emy qui avait soif de respectabilité.

Murphy avait fini par obtenir un poste de gardien-chef dans le comté voisin. Dans ses bagages, il avait emporté le seul souvenir auquel il paraissait tenir : Audrey. Nous, nous savions hélas qu’il en était fini de nos fantasmes avec Miss Melons.

De l’équipée d’Oraculo nous était resté Deborah, qui s’était fait une honorable vie en épousant un des bouseux du coin. La dernière fois qu’on avait entendu parler de ce bagne du malheur, c’est un matin par la bouche de Mr O’Hara qui avait lu dans son journal que Jim Hayes, dit le Rat, était mort sur la chaise électrique, ce qui semblait justice pour beaucoup. Mais nous, on savait bien qu’il était mort grillé, le Rat, par une décharge de deux mille volts et que ç’avait été une drôle de fin pour lui.

— Je sais, les gars, avait soupiré Mr O’Hara, ce type d’exécution est une véritable horreur. Mais nous n’avons rien trouvé d’autre pour éradiquer les nuisibles comme lui !

Dois-je ajouter qu’à notre grand regret, on avait transféré Reno dans une prison du chef-lieu du comté et qu’il était toujours dans l’attente d’un procès. En le voyant monter dans le fourgon, on s’était dit que nous tournions une page, Jim et moi, que cette année si pleine d’événements nous marquerait à vie. Oui, nous avions compris que Patville n’était plus tout à fait le bled que nous avions connu. Mais pas non plus la ville à laquelle on rêvait, quand Jim ayant sa claque des O’Hara jurait qu’il quitterait un jour Patville.

Ah oui, une autre chose ! Le Cactus’ Bar s’était refait une beauté, avec tout le toutim flambant neuf ; sa façade surtout, avec l’enseigne peinte en jaune citron, ayant l’allure d’une devanture de Las Vegas, aussi brillante qu’une carrosserie de Cadillac.  A l’intérieur, un bar en formica rouge pétard, un flipper rutilant, un juke-box clignotant et un billard américain, avec ses boules colorées qui attendaient dans leur triangle sur un tapis vert cru, pareil à un gazon de golf.

Si je dis ça, c’est que Collins avait été convié ces derniers temps aux Terres Hautes, le jour où J. Cooper avait inauguré le golf qu’il avait fait aménager chez lui. Et Jeff nous en avait décrit le gazon vert et le parcours de golf, — un sport qu’il ne connaissait pas, n’ayant jamais vu de sa vie ces petites boules blanches qu’on poussait dans des trous avec des cannes, appelées clubs.

Même le village indien, groupe de tentes dressées après l’inondation, pour abriter provisoirement les familles rescapées, avait fini par être démonté, Cushing ayant logé ces gens dans des maisons en dur. Il n’était pas peu fier qu’en période de crise, le village ait montré autant de solidarité. Leur chère communauté n’avait pas manqué de ressources, encore moins de courage. Mais tous ces grands travaux leur avaient coûté cher. Il se voyait déjà devant mendier à deux genoux d’autres subsides aux services du comté.

Avec tout ça, on en avait presque oublié que nous avions grandi, nous autres ! Douze centimètres pour Jim et dix pour moi ! Pas franchement de quoi s’en glorifier, mais tout de même ! On sentait bien qu’on allait sortir de l’enfance, sans en être pour autant transportés ou heureux. Plutôt déboussolés et décidés à ne pas ressembler à ces caricatures d’adultes qui peuplaient le village. Ça, pas question ! « Plutôt crever ! » avait assuré Jim, en envoyant valser dans la poussière un glaviot de première.

En fait, c’était Emy qui avait mis le doigt dessus, un jour qu’on faisait la conversation avec elle. « Avez-vous seulement remarqué que je ne vous appelle plus : les garçons ? avait-elle dit, nous alertant d’un coup. Vous grandissez et devenez de petits hommes ! Je le vois à vos mines et surtout vos regards ! Le tien, surtout, avait-elle poursuivi à l’adresse de Jim. Bientôt, — ce ne saurait tarder, vous oublierez la bonne vieille Emy pour courir le jupon ! Vous vous moquerez bien des confidences de Jeff, de la vie à Patville ! Vous chercherez à voir le monde !».

— On pourra jamais t’oublier, Emy, même si on fout le camp d’ici, avait répliqué Jim.

— C’est vrai ! Pas plus que Jeff d’ailleurs, avais-je lancé dans la foulée.

— Taratata ! Je n’en crois pas un mot ! Emy ne sera plus qu’un souvenir pour vous. Et quand vous serez grands, vous ne penserez plus ni à moi, ni à Jeff ! La vie vous aura convoqué pour faire le métier d’homme !

Voilà comment elle nous causait, Emy. Et ça nous faisait drôle de l’écouter ainsi nous débiter tout ça. Mais elle n’avait pas tort, au fond. Tout ça, nous le sentions. Déjà que Jim s’était entiché de Brenda et qu’il n’attendait plus que le dimanche pour la revoir. Qu’il n’était plus vraiment le même et qu’il marchait d’un autre pas qu’avant : torse bombé et épaules conquérantes, cannes légèrement arquées, un peu comme s’il roulait les mécaniques.

Le dimanche, il portait une tenue impeccable, grâce en partie à l’art de repasser de Mme O’Hara, et ses cheveux étaient coiffés comme jamais. En me voyant, il me lançait un bref clin d’œil, des plus discrets, marchant au côté de Mme O’Hara, vêtue élégamment, qui paraissait si fière d’avoir su le traîner sans trop de peine au temple.

Mais elle était loin de deviner la vraie raison qui avait suscité une piété aussi soudaine et eût été surprise d’apprendre que celle qui avait su le décider à fréquenter le temple et l’avait peut-être même converti, n’était autre qu’une gamine à la peau toute noire, nommée Brenda Jackson.

Le temple, comme je l’ai dit, n’était pas ma cantine. Mais si Jim y allait, pourquoi n’aurais-je pu m’y rendre aussi ? Que Pa et Ma aient leur idée, c’était une chose. Mais moi ! J’avais gardé le souvenir de l’incroyable traversée racontée par Mr O’Hara de ceux qui n’étaient autres que les ancêtres du révérend.

Des religieux ayant emporté avec eux des malles entières remplies de bibles et qui, dès qu’ils avaient posé le pied en Amérique, avaient instruit leur monde avec un baratin d’enfer, digne du révérend. En 1600 et quelque, que ça avait eu lieu. Ça remontait à vieux, ça oui ! Des Pères, en total bisbille avec les religieux anglais, partis sur un bateau, le Mayflower, vaisseau marchand de 180 tonneaux, — selon Don O’Hara, avaient quitté un beau matin Plymouth pour débarquer soixante jours plus tard au Cap Cod, dans le Massachusetts, à Provincetown.

Une sacrée équipée, d’autant que d’autres s’étaient mêlés à eux, fermiers et artisans européens pour la plupart ! Don O’Hara, qui n’était pourtant pas bigot, avait évoqué leur mémoire avec un infini respect et même une émotion réelle. Je le revois encore posant sa pipe sur son bureau, afin d’en faire refroidir le fourneau.

« Ces Pilgrim Fathers, avait-il gravement embrayé, avaient pour chef un dénommé William Bradford… ».  Mais il n’avait pas pu poursuivre car nous avions la tête ailleurs. « Un vrai nom de pirate ! » avait dit Jim, en se marrant. « Ah, non ! Rien à voir avec Long John Silver, quartier-maître du Walrus ! » avais-je aussitôt répliqué.

Il s’en était suivie une courte discussion entre nous. Du coup, Mr O’Hara nous avait laissé quartier libre. « Bon, je vois qu’aujourd’hui vous n’avez pas la tête à écouter ! Allez jouer ! ». Une sacrée page d’Histoire pourtant que tous ces Pères qui avaient dû fuir l’Angleterre pour pratiquer leur religion, une page glorieuse dont Jim avait fini par tomber sous le charme.

Ça valait bien, faut dire, l’histoire de Pinkerton et sa première agence de détectives ! C’est vrai aussi que de pareilles histoires auraient pu rendre dingue le meilleur d’entre nous !

C’est ainsi qu’était née « notre bonne mère l’église », (dixit Mme Holy) en remontant bien des années plus tôt, enfin s’il fallait croire aussi le révérend qui, tout au long de ses sermons, ne manquait pas de renouer avec l’héroïque arrivée de ses pairs, devenue acte fondateur de notre petite communauté. Du moins, c’est en ces termes-là qu’il s’exprimait, le révérend, avec beaucoup de gravité et même d’exaltation, aux dires du nouveau pratiquant qu’était Jim. Acte fondateur : ça, c’était bien trouvé ! Ça avait de la gueule ! Petite communauté, ça faisait au contraire cul-bénit. Mais bon, c’était ainsi que le révérend s’adressait à ses ouailles ! Et on n’y pouvait rien, nous autres.

Toujours est-il que le dimanche où je devais retrouver Jim au temple pour voir enfin la lumineuse Brenda, je m’étais habillé un peu mieux qu’en semaine. Après m’être levé sans émettre un seul bruit, je m’étais éclipsé, sachant que la maison dormait encore.

Et j’avais pris grand soin de ne pas réveiller Janis qui, me sachant aller au temple, ne m’aurait pas lâché d’une semelle. Quoiqu’elle dormît encore, je savais qu’elle avait des antennes et surtout un sommeil léger. Donc, j’y étais allé mollo et avais pris mes précautions dans l’escalier. « Parcours sans faute », m’étais-je dit, une fois sur le trottoir.

Dehors, on pouvait déjà voir des ploucs endimanchés qui se rendaient au temple. D’autres, qui déjà y pénétraient à queue leu-leu, adressant des saluts à chacun avant de disparaître dans le saint des saints. J’avais aperçu Jim et Mme O’Hara qui franchissaient le seuil.

Planqué derrière un arbre de la place, j’avais dû patienter que la porte du temple se referme. Alors, je m’étais approché et, après avoir vérifié que personne n’était là pour me voir, j’avais poussé la lourde porte et m’étais faufilé à l’intérieur du temple. Ayant repéré un pilier, je n’avais pas tardé à me cacher derrière.

Jim n’avait pas menti. Ils étaient tous debout, de dos, et répondaient au révérend des « Gloire à Dieu » et des « Amen », en veux-tu, en voilà.  Me hissant sur la pointe des pieds, j’avais pu voir l’homme de Dieu débiter ses fadaises et, pas très loin de lui, le groupe des petits chanteurs composant la chorale.

Entre deux têtes, j’avais aperçu Jim en première ligne et, à côté, la fameuse Brenda, dont le visage brillait autant que les bottes de Cushing, quand il se décidait à les cirer. Vrai, elle était exactement comme Jim l’avait dépeinte ! Avec sa robe blanche et ses chaussures luisantes, et son minois si avenant, des yeux si vifs, que je n’avais pas tardé à tomber moi aussi sous le charme.

Debout, les mains derrière le dos, attendant le moment de chanter, se dégageait de sa personne un halo de lumière. Ce qui m’avait frappé, c’était sa touffe de cheveux, coiffant son rond et lumineux visage comme un buisson épais. Oui, c’était ça : un buisson de cheveux, crépu et arrondi, coupe afro avant l’heure, qui ne tarderait pas à devenir un symbole de lutte pour Angela Davis et les Black Panthers.

Mais Jim avait bougé, se balançant d’un pied sur l’autre, attirant du même coup mon regard. Ses yeux s’étaient posés sur sa voisine Brenda, la couvant d’un regard attendri. Dire qu’il était aux anges n’aurait traduit que maigrement son état du moment.

Moi, je le voyais bien comme ce fameux jour où un magicien débarqué à Patville avait fait décoller une femme couchée par terre, rien qu’avec la seule force de ses mains. La lévitation, que ce tour s’appelait. De la véritable magie. Eh bien Jim, dans l’instant, me semblait à deux doigts de s’élever du sol pour flotter dans les airs !

Mais le révérend avait commencé son sermon. Tous s’étaient rassis, et j’avais dû me dissimuler à nouveau derrière mon pilier protecteur, sans bouger d’une semelle. Me sentant clandestin, j’aurais voulu pour rien au monde être surpris en un tel lieu. Je visionnais déjà la mémorable raclée que me flanquerait Pa et les lamentations de Ma. Ah, non, pas ça ! Je me serais fondu plutôt à la pierre du pilier, n’eût été son impitoyable froideur.

Le sermon étant entamé, j’avais dû finir par tendre un peu l’oreille. D’entrée de jeu, le révérend avait parlé avec sa voix vibrante d’un nommé Abraham à qui Dieu était apparu. L’Abraham en question était assis devant sa tente quand trois bonshommes s’étaient pointés, arrivant du désert ou je ne sais trop quoi. Là-dessus, Abraham avait demandé à Sara, sa bonne femme, de leur faire à bouffer. Des galettes de blé avec du lait de chèvre, enfin des choses comme ça, si vous voyez.

Bref, une fois que tous avaient mangé comme des chancres, l’un d’eux avait prédit que, dans un an, Sara aurait un fils. Sara s’était mise à pouffer car, avec Abraham, ils avaient passé l’âge de pouvoir enfanter. Alors Dieu, — venant d’on ne savait trop où, du désert, semblait-il, avait direct parlé à Abraham, voulant savoir pourquoi son épouse riait. Sara, prise sur le fait, avait nié avoir ri…

Et Dieu lui avait dit : « Si, tu as ri ! Je t’ai vu, ne mens pas ! » Une histoire à dormir debout ! Je n’avais pas cherché à suivre la fin de cette histoire débile. D’ailleurs, c’était presque fini, ce qui me confirmait que ça m’avait tout l’air d’être sans queue ni tête. Jim, après coup, m’avait appris qu’il s’agissait d’une parabole et qu’il avait lui-même du mal à comprendre ces choses-là.

Pour autant, le révérend n’avait pas dételé, ça non ! Pas même sûr qu’il y croyait à son histoire, d’Abraham et sa femme ! Mais passons ! Après un éclatant Chers frères et sœurs en Christ, il s’était enflammé, parlant en un tumultueux torrent de mots des Apôtres, de l’amour de la Vérité, du Repas du Seigneur, du Royaume de Dieu et de mille autres choses qui en auraient déboussolé plus d’un, dont moi.

J’avais un mal de chien à assimiler toutes ces choses, peut-être parce qu’elles me venaient en cascades ! Peut-être que Jim m’en dirait plus, une fois l’office terminé, mais pour moi, là, c’était franchement la brasse coulée !

Adossé au pilier et loin de tout regard, je me répétais à mi-voix que ce n’était pas folichon d’attendre ainsi que la chorale de Jim et de Brenda se décide enfin à pousser sa chanson. Il en avait pour combien de temps, le révérend ? Sa voix s’était faite ample et éloquente, comme qui dirait tempêtueuse.

« Vous êtes le sel de la terre ! s’était-il écrié. Vous êtes la lumière du monde, les gardiens de l’Evangile sans laquelle l’humanité sombrerait dans les Ténèbres ! Ainsi, dans le Sermon sur la montagne, versets 1 et 2, Jésus ne s’adresse pas à la foule, mais à ses disciples !

Et que leur dit-il ?

Que les Chrétiens seuls demeurent le sel et la lumière du monde !

Car tout homme ne peut être sel et lumière du monde, s’il n’est pas Chrétien ! Voilà, mes chers frères et sœurs en Christ, ce que dit notre Seigneur ! L’œuvre de la loi de Dieu est écrite dans nos cœurs ! Seulement voilà, le Seigneur nous a mis en garde ! Si le sel perd sa saveur, comment peut-il être à nouveau sel ? Ne valant plus rien, on le jette au sol et les hommes le foule aux pieds ! Et quand on allume une lampe, ce n’est pas pour la cacher sous le boisseau ! Ne doit-elle pas briller pour les habitants de la maison ? 

Ainsi, quand votre lumière brillera devant les hommes, soyez le sel de ce monde ! Soyez rayonnant de joie, là où l’Evangile apporte la guérison, partout où règnent la haine et la violence, partout où dominent l’indifférence et l’injustice ! Soyons donc ici, à Patville, la lumière de l’Evangile, le sel de la Vérité de Dieu ! Que notre communauté vivante et fraternelle réponde à l’appel de Dieu ! Amen ! »

Son bla-bla fini, tous s’étaient levés, répondant amen d’un même chœur. Quelques raclements de gorge et frottements de pieds s’étaient fait entendre à la hauteur des bancs. Puis s’était comme imposé un grand silence. Et c’est justement à ce moment précis que les voix de la chorale avaient livré un chant puissant, proclamant la gloire de Dieu.

Des voix claires étaient montées, résonnant là-haut, sous la large voûte du saint lieu, voix qu’on aurait dit comme épurées par le vent des Terres Hautes. Puis soudain s’était envolée, comme un oiselet du nid, une voix chaude, profonde, qui m’avait saisi, à me faire dresser les poils des bras et à me couvrir l’échine de frissons.

J’avais dû tendre la tête et ainsi me retrouver à découvert, mais pour voir un merveilleuse apparition : Brenda, roucoulant toute seule dans la vive lumière des cierges, avec toutes les autres voix en contrepoint, formant comme un somptueux écrin à son envol. Un moment de grâce inouïe. Plus tard, Jim m’avait appris qu’elle possédait une voix très rare, une voix à cinq octaves, proche de celles qui chantaient déjà la soul music, dont Brenda serait plus tard une des singulières figures.

Quand son chant s’était tu, j’avais mis deux bonnes secondes à redescendre sur terre et à quitter dare-dare le temple comme j’y étais entré, pareil à un voleur. Une fois dehors, encore sonné par la voix de Brenda, je m’étais blotti derrière un des arbres de la place.

Étant passé de mon pilier à l’arbre, je dus admettre que je préférais l’arbre, sachant que sous l’écorce courait tout un réseau de sève. Enfin, je m’étais mis en tête d’attendre sereinement la fin de l’office, prêt à guetter la sortie triomphale de Jim et de Brenda. Peut-être qu’ils sortiraient bras-dessus, bras-dessous, avec des anges les tenant par la main ?

Je m’étais demandé aussi, alors que je faisais le pied de grue, quel pourrait être notre avenir, à Jim et moi, et dans quel monde chacun aurait à faire son métier d’homme. Mais ça, nous ne tarderions pas à le savoir !

Attention : à partir de la semaine prochaine retrouvez la plume d’Yves Carchon le mercredi sur mon blog littéraire Rainfolk’s Diaries. Pensez à vous abonner, c’est gratuit et ça fait toujours plaisir.

Patville, un feuilleton signé Yves Carchon, écrivain, auteur de "Riquet m'a tuer", de "Vieux démons", de « Le Dali noir », et de son nouveau polar « Le sanctuaire des destins oubliés »

 

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10 commentaires

  1. un véritable feuilleton…..pour ce qui est des voitures qu’elles soient de sport ou pas, je suis très admirative que l’on puisse encore voir de si beaux anciens véhicules, ce musée doit être superbes à visiter…..passe un doux vendredi

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