C’est avec un sourire narquois que je relis mon précédent article « Au secours, je vais bosser en Albanie ! » dans lequel j’exprimais mes craintes quant à ce reportage. Croyez-moi ou non, bon nombre de mes préjugés étaient totalement non fondés…
L’Albanie, un pays paradoxal
Et c’est heureuse, ravie, enchantée que je suis revenue de ce pays paradoxal qui m’a totalement envoûtée. Je ne vais pas me lancer dans la description scolaire des lieux que j’ai visités. Le guide « Le Petit Futé » vous renseignera à ce sujet nettement mieux que je ne pourrais le faire. C’est donc mon ressenti et quelques anecdotes que je vous livre ici.
Mon principal stress était dû au machisme supposé. Je me voyais déjà en train de gueuler comme une possédée devant un Albanais qui m’aurait fait la leçon sur mon absence de retenue, typique de la femme libre d’Europe de l’Ouest.
Voire à m’amuser à provoquer scandale sur scandale, un peu comme j’ai fait en Russie, en me comportant comme un gros balourd de sexe masculin mais en continuant à me vêtir en femme. Eh bien, ma surprise fut grande !
Pas une seule fois je n’en suis venue au pugilat face à un inopportun. Aucun #balancetonalbanais ne m’a titillé les doigts. La seule approche que j’ai vécue a été un compliment formulé en grec par deux jeunes hommes à Permet, trou perdu qui n’a pas changé depuis 50 ans.
Pas de bol pour eux, je comprends un peu cette langue et c’est avec un grand sourire que je me suis retournée, fis la révérence et leur répondis « Ephkaristo poli » (Merci beaucoup dans la langue de Périclès). Je fus applaudie en retour. Je crois que ce n’est pas tous les jours qu’ils ont l’occasion de se faire gentiment moucher de la sorte !
Bien au contraire, j’ai été frappée par l’immense sympathie des hommes comme des femmes, tant dans les villes que dans les campagnes. Certains mauvais esprits me diraient que cette bonté n’est que de façade et qu’elle doit forcément être motivée par les euros que moi, voyageuse issue d’un des pays les plus favorisés au monde, aurais distribué à tout va.
Mais… Voyez-vous un quelconque intérêt dans l’invitation d’une villageoise sexagénaire, qui semblait s’ennuyer dans son jardin et qui me proposa de vider un godet en sa compagnie ?
Et que dire du guide d’une journée à Tirana qui rougit comme une communiante quand je lui laissai un pourboire auquel il ne s’attendait visiblement pas ?
Est-ce aussi l’intérêt qui motiva une étudiante à partager mon petit-déjeuner à Vlorë, simplement pour avoir l’occasion de converser en anglais ?
Les Albanais sont chaleureux, bons vivants, curieux, bavards, conviviaux. De nombreuses fois, on partagea avec moi des fruits frais, des cigarettes, des pâtisseries, sans rien attendre de plus qu’un peu de conversation.
Bon, je vous l’accorde, j’ai quand même un peu tremblé quand on me fit goûter une noix confite à la chaux (Sic !!!). Bien que le procédé me semblât quelque peu bizarre, je fus surprise par la douceur de ce fruit. On aurait dit une figue enrobée de miel…
Je craignais aussi pour les conditions d’hygiène et la sécurité routière. L’Albanie est certes poussiéreuse et, dans le Sud-Ouest, les plages sont quand même bien cracras. Merci bien aux riches Kosovars et aux oligarques russes qui acquièrent des hôtels entiers avec leur gros portefeuille et leurs manières abjectes !
J’ai passé deux heures à Ksamil, le Bora Bora albanais. Bien que le paysage soit un des plus somptueux du sud de l’Europe, la faune humaine présente m’a donné de furieuses envies de retraite monastique. Dans le genre « musée du porc et de la roulure », j’ai été servie.
Quelle tristesse quand on voit la beauté première du lieu et quand on sait que 95% de ces touristes sont des nouveaux riches de Russie, d’ex-Yougoslavie, de Pologne, de Roumanie ?
Là-bas, les Albanais tirent la gueule… Comme je les comprends !
Mais en dehors de cette vilaine expérience, autant dans les nombreux sites archéologiques que dans les petites villes, véritables écrins nichés dans une nature verdoyante, j’ai été stupéfaite de la pureté de l’air, des eaux limpides, des ruelles chatoyantes de couleurs vives.
Quant à la sécurité routière…
Bon, c’est le paradis des Mercedes. En général, des modèles de 14ème main datant des années 80. Sur les grands axes, la conduite est musclée, mais par rapport au périph parisien, la route des Ardennes, voire n’importe quelle voie routière italienne, les nationales sont de vraies pistes de bowling, et les conducteurs relativement raisonnables.
Les coups de klaxon sont fort nombreux, mais étrangement, ils ne paraissent absolument pas agressifs ou hargneux. On « pouêt » pour dépasser un camion… mais aussi pour saluer un pote croisé par hasard !
Tout cela reste bon enfant. A titre comparatif, la conduite dans le sud de l’Italie est un enfer total et absolu, tant visuel qu’auditif.
La tolérance fait aussi partie des coutumes du cru. Musulmans, orthodoxes, catholiques, bektachis vivent en parfaite harmonie. Un proverbe dit là-bas qu’au bout de vingt ans de mariage, il est possible de ne pas encore connaître la religion de son conjoint.
Les raisons sont simples : primo, la religion n’a pas une importance primordiale dans les liens amicaux ou familiaux. Secundo, chaque culte est pratiqué de façon hyper relax.
Et enfin, on considère plus ou moins consciemment que cela fait partie de la sphère intime de tout un chacun.
Enfin, quand je vois les nombreuses possibilités de randonnées dans des paysages incroyables ainsi que les gîtes ruraux qui se construisent peu à peu, je songe à l’avenir de ce pays. Les tourismes culturels et écologiques sont déjà bien développés et je ne doute pas un seul instant que ce sera prochainement une destination de choix pour les amoureux de l’Histoire et des espaces verts.
En revanche, qu’on arrête de construire des bouges infâmes tout au long de la côte sud. L’Albanie est et vaut tellement plus ça !
Ainsi, je conclus en évoquant cette rudesse mêlée de candeur, ce goût des plaisirs de la table et de la discussion joint à une grande pudeur d’âme, cet art de conjuguer douceur, ardeur, labeur et fatalisme, cette ouverture d’esprit teintée de préjugés parfois étranges et surprenants.
J’ai accepté dès mon arrivée de me perdre un peu, d’être déroutée, surprise, de sortir la tête des rumeurs persistantes sur ce joyau encore méconnu et injustement mésestimé.
Bref, en un mot comme en cent, allez-y ! Seuls les esprits chagrins, conventionnels et étriqués ne seront que peu conquis. Car pour aimer l’Albanie, il faut aimer la vie et la dévorer pleinement, jusqu’à s’en faire une indigestion de véritable allégresse !
Une chronique signée Virginie Vanos
De retour d’un circuit en Albanie de 8 jours: une très belle découverte. On avait un très bon guide qui nous a fait comprendre le passé et le présent des albanais. On a rencontré des gens aimables, souriants, ouverts.
Pourvu que le pays se préoccupe d’urbanisme et de gestion des dechets….
merci pour ce témoignage
J’adore ce qu’écrit Virginie Vanos… C’est frais, clair, tonique…Le voyage lui va bien ! L’Albanie, donc, autre destination à préparer et dont Virginie parle si bien !
Exact Yves, ce sera intéressant de croiser vos regards quand tu auras fais le voyage.
Hum, maintenant prêt à reconsidérer l’Albanie…
Etienne
C’est très bien, un beau pays à mon avis
C’est fait, l’image de l’Albanie a retrouvé toute sa beauté et je ne demande qu’à m’y perdre à mon tour…
Bon voyage alors !
Une belle façon de raconter son coup de foudre pour ce pays.
En plus, elle donne vraiment envie d’en faire autant, ce qui est très rare, enfin, pour moi …
Bon jeudi, caniculaire … hélas.
Pas pu dormir de la nuit, mais je ne dois pas être la seule.
Je ne fais pas de bisoux, trop collants !
Virginie sait transmettre ses passions.
Dom, je dors dans la cave de chez mes parents… Un vrai bonheur! Fait hélas trop chaud pour porter les deux jolies robes en coton que j’ai achetées là-bas… Mais le bel éventail acquis à Gjiroskaster est utilisé à m’en flinguer le coude!