Attends, c’est quoi !
Clara était partie depuis un an quand je suis retombé un jour sur l’amphigourique manuscrit qu’elle aurait dû taper… L’ayant posé négligemment sur une étagère du grenier, il était recouvert d’une fine couche de poussière. Normal : un manuscrit, par essence, est toujours condamné à finir sur une étagère. Dans un grenier, c’est bien. Dans une cave, c’est déjà moins glorieux…
Quand on le prend en mains, ses pages, quand on les tourne, sentent le moisi. Dans un grenier, c’est plus tranquille. Le manuscrit fait une longue sieste, à l’abri de l’humidité. Enfin, dans le meilleur des cas. Les mots qui le composent sont endormis…
Pour eux les pages sont devenues des draps ….
Bref, le manuscrit peut vivre peinard sa vie de manuscrit !
Pour peu qu’on ait un semblant de courage, on peut les réveiller, en les époussetant. Le texte peut y gagner, qui sait. C’était un peu l’idée que j’avais eu en contactant Clara. Là, main sur le manuscrit qui sommeillait encore, j’hésitai. « Mieux vaut, me dis-je, le laisser reposer !
Encore quinze ans comme ça, et il aura peut-être sa chance ! Trop tôt !
Laissons-le sommeiller du sommeil du juste ! » J’ai quitté le grenier, fier et en arborant un air faraud.
Là, j’avais su dire non et montrer du courage !
A peine en bas, je crus entendre des cris dans le grenier. « Attends, c’est quoi ! » Je pensais à un chat. Je montai aussitôt, ouvris brutalement la porte.
Le manuscrit était tombé sur le plancher et en sortaient des mots, couinés je ne sais trop comment, de petits cris si malheureux, si douloureux que je le pris contre mon cœur, comme un enfant que l’on console, jusqu’au moment où ses cris se tarirent et qu’un antique silence tomba dans le grenier.
Alors, sans trop savoir pourquoi, j’en voulus à Clara.
Une nouvelle signée Yves Carchon, écrivain, auteur de "Riquet m'a tuer", de "Vieux démons" et de « Le Dali noir »
les mots passés, le bonheur passant
totalement
quelque part on se sent coupable si on ne lit pas ce qu’ un autre s’ est donné la peine d’écrire !
Bonne journée Bernie
ah oui, c’est pour ça que je m’impose de finir tous les livres que je commence