Un bar tout nu, sans âme qui vive…

Avec Clarté perdue, Yves Carchon nous fait vivre, dans cette micro-fiction, les souvenirs qui se pressent la nuit, le bar de l’adolescence perdue, et de l’amour qui perlait.

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Clarté perdue

Des lieux que j’ai connus me parlent encore. Telle maison que j’ai aimée, que je retrouve en rêve où j’erre encore, dans le noir de la nuit.

Le tabac-presse de mon ancien quartier où travaillait une plantureuse blonde.

La rue où j’habitais, enfant, et qui parfois revient me visiter.

En rêve, comme de juste. La nuit, les souvenirs se pressent, comme si le jour, ils ne pouvaient se déployer.

Les souvenirs aiment le silence, la paix du cœur, la tranquille somnolence et l’infinie absence.

Ainsi, la nuit dernière, je suis entré dans le petit bistrot où nous nous retrouvions à la sortie des cours.

Déserté aujourd’hui, puisque l’école où nous allions a dû fermer ses portes. Sur la banquette où nous posions le camp, je nous ai vu nous bécoter à bouche-que-veux-tu.

Tu adorais, quand tu avais très soif, boire une menthe à l’eau.

Elle était fraîche comme ton teint aux couleurs abricot et aussi verte que tes yeux. Tu avais une coquetterie dans l’œil droit, et cette infime tache, je l’aimais.

Parfois, préoccupée par un devoir à rendre ou un exposé à bûcher, tu oubliais de m’embrasser. J’en étais malheureux, car de ta bouche perlait l’amour.

Notre bistrot, cette nuit, m’apparut bel et bien frappé par un enchantement. Pas un serveur, pas le patron qui nous lorgnait jadis derrière son bar, pas de clients.

Un bar tout nu, sans âme qui vive. Un décor de théâtre.

Celui de notre adolescence perdue.

yves carchon auteur romancier polar

Une micro-fiction signée Yves Carchon, écrivain, auteur de "Riquet m'a tuer" et de "Vieux démons"

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Bernie
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10 commentaires

  1. Heureusement les rêves nous donnent l’occasion de retrouver ces lieux , car souvent les bars de notre adolescence n’existent plus .

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