Comment aborder le thème de la mort avec vos enfants ?

Il va sans dire qu’en fonction de vos convictions à vous, tant philosophiques, spirituelles que purement humaines et dans la chair, la façon dont vous allez aborder le thème peut être complètement différente.

Il n’y a pas, pour ainsi dire, de jugement de valeur à avoir sur la ou les versions que vous pourrez trouver, le tout, nous semble-t-il est de parvenir à ne pas angoisser davantage l’enfant vis à vis de cet événement de vie qui nous tient tous en haleine et nous rappelle à notre égalité intrinsèque face à l’existence.

Que vous soyez croyant ou athée, que vous imaginiez la vie comme un simple passage vers autre chose ou comme une parenthèse chronologique miraculeuse au cœur d’un néant sans lumière, ni fondement, cela va nécessairement influer sur votre discours, néanmoins encore une fois, considérez que si votre perspective est anxiogène pour vous, elle n’en sera sans doute que pire aux oreilles et à l’intellect de votre tête blonde, brune ou rousse, alors tâchez de ménager la chèvre et le chou, de faire preuve de psychologie, et profitez-en pourquoi pas pour échafauder la construction d’un récit, d’un raisonnement, voire d’un mythe personnel qui saura peut-être bien vous aussi vous aider à chasser cette peur indicible de l’Après, qui, chacun à notre échelle, nous a tous au moins à un moment donné de notre vie, enserré dans son étau du non-savoir…

…par Romain Pillard.

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Aider les enfants à comprendre la mort

I/ De la petite enfance à la grande enfance…

Même s’il est un peu subjectif de vouloir envisager ce que représente ou peut représenter la mort dans l’esprit d’un nouveau né ou d’un bébé de 1 à 2 ans, le monde des pédopsychiatres s’accorde pour dire qu’à cet âge il est impensable que les petits êtres en devenir puissent en comprendre exactement le sens.

Cela ne veut évidemment pas dire, que, indirectement, ces mêmes petits êtres ne soient pas parfaitement capables de ressentir l’émoi et la peine infinie éprouvés par un proche qui connaîtrait un deuil, au contraire, on sait très bien que le bébé capte cela avec une acuité et une profondeur surprenante…

Pour un nouveau né et un enfant en très bas âge, jusqu’à 2 ans environ, avant qu’il ne puisse réellement formuler des phrases tricotées de mots pour « vider » son esprit de ses turpitudes, les spécialistes estiment que le nourrisson perçoit la mort d’un proche dans un perspective purement sensorielle, c’est à dire qu’il fait l’expérience d’une disparition de divers stimuli, tels que la voix, le toucher, l’odeur et ce genre de choses.

Sans véritable outil pour l’exprimer, l’enfant aura tendance à ressentir cette disparition soudaine un peu comme une amputation, et si son intellect et sa conscience auront du mal à réellement entériner quelque chose comme une « version définitive » des événements, qui lui serait propre, on considère que le deuil va malgré tout s’inscrire en lui, mais davantage dans son corps que dans sa mémoire…

C’est pas ce truchement que très souvent, bien des années plus tard, alors qu’il ne sera pas même en mesure de poser le doigts dessus lui-même, l’enfant fera l’expérience de « rebonds sensoriels », au détour d’une odeur, d’une vision, dans la manière dont il sera bercé, ou ce genre de choses (et le plus souvent sans qu’il ne puisse se l’expliquer…).

Avec le temps qui passe, aux alentours de 3 ou 4 ans, avec l’entrée à l’école et l’accumulation des expériences de la vie, le concept même de mort va se faire une place par lui-même, au détour de la disparition d’un animal domestique, de la perte d’un nounours ou d’une poupée fétiches, dans les conversations avec les camarades de l’école ou avec les « grands », à la télévision, etc.

A ce stade, par la force des choses, l’enfant arrive au stade ou il doit accepter ou en tout cas pleinement et consciemment faire l’expérience du côté irrémédiable de la mort. Au demeurant, l’idée même de cette dernière demeure relativement abstraite, certes il commence à comprendre que cela correspond à quelque chose comme « On ne respire plus », « On ne bouge plus », « On cesse d’être présent physiquement », néanmoins l’aspect irrémédiable et permanent de cet état de fait lui est encore quelque peu étranger et n’est en tous les cas pas tout à fait intégré.

C’est l’âge durant lequel, tous nous y sommes passés, nous avons joué la comédie et commencé à « faire le mort » puis à « ressusciter » miraculeusement, cette période qui connaît l’acmé du paradigme de la fameuse pensée magique, qui place chaque enfant non pas au centre du monde, mais plus largement encore, de l’univers tout entier…

 

Pour les plus précoces des petits, c’est autour de 5, 6 ou 7 ans, que l’on apprend à son grand dam le plus souvent, que le Père Noël n’existe pas vraiment et que désormais il faudra composer le monde sans cette apparition annuelle d’un grand gaillard à l’embonpoint joyeux et aux origines mythiques…

Ne sous-estimez pas cet événement qui pour certains relève littéralement de la tragédie, car, bon nombre d’entre nous peuvent sans doute en témoigner, cela laisse une trace indélébile dans notre âme d’enfant, et souvent nous propulse dans un monde qui, s’il n’a pas changé en substance, n’est pour autant plus tout à fait le même…

Or n’est-ce pas là justement l’état de fait et la conclusion qui s’impose, lorsque l’on perd quelqu’un qui nous est proche ?

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Alors que l’enfant se rapproche doucement de sa première décennie sur la Terre, autour de 8 ou 9 ans, généralement le concept se précise, toujours par l’entremise de la fameuse expérience de vie et des événements qui servent de mortier à l’édification de cette dernière…

C’est le plus souvent à cette période que les premières questions « structurées » et les premiers raisonnements propres à sa petite tête, vont voir le jour et dépasser les interrogations somme toute basiques et la plupart du temps désarmantes d’innocence que des réponses bien senties suffiront à nourrir et à apaiser…

À cet âge, sans très bien comprendre ou cerner le pourquoi du comment (du reste, c’est notre lot à tous y compris à l’âge adulte…), l’enfant sait désormais ce que signifie la mort, et comprend également ce qu’elle entraîne lorsqu’elle fait irruption dans nos vies ; elle a été intégrée comme faisant partie intégrante de la vie, même si sa nature profonde quant à elle, demeure (et demeurera peut-être encore longtemps…) un mystère insondable.

En termes de synthèse à cette première partie, nous aimerions insister sur le fait qu’il ne faille pas, d’une manière générale, forcément devancer les interrogations, les doutes ou les angoisses de votre enfant dans un contexte de deuil…

Soyez là pour répondre à ses questions bien sûr, tâchez aussi de ne pas lui raconter des histoires à dormir debout (à cause desquelles ils pourraient tomber de haut plus tard, en se faisant sa propre idée du monde et du sens de la vie…). Ne lui mentez pas, et faites en sorte aussi, dans la mesure du possible de ne pas l’effrayer outre mesure (même si cela est parfois difficile, notamment pour les personnes qui subissent l’angoisse de la mort « à jour que Dieu fait »…) ; comprenez que ce dont les enfants ont le moins besoin pour ce qui est du traitement de ce thème, c’est d’un surplus d’angoisse dont ils se seraient bien passé.

Nous pouvons aussi vous conseiller de poser quelques questions simples en regard à ce que vous venez d’expliquer, ne serait-ce que pour ne pas laisser de zone d’ombre et voir si tout a été bien saisi dans votre propos.

Et surtout, pour finir, donnez-vous aussi le droit de ne pas jouer à l’encyclopédie de la métaphysique ! C’est à dire qu’il n’y a pas de honte, ni de contre indication à faire savoir à votre enfant que vous ne savez tout bonnement pas ce qu’il se passe une fois l’existence arrivée à son terme…

Exprimez cela sans faire peser de crainte, de peur, ou d’angoisse supplémentaire, ne rentrez pas forcément dans des considérations dignes d’une extrapolation Dantesque ou Freudienne du sujet, et soyez incomplet sans complexe, là où le sujet vous dépasse, cela aidera quoi qu’il en soit l’enfant à structurer sa réflexion et son esprit.

 

2/ Du positionnement juste et de la place à prendre et à laisser…

Il existe toute une littérature dédiée au sujet du traitement de la mort chez l’enfant, et nous vous laisserons le soin de faire vos recherches par vous-même afin de trouver les ouvrages qui sauront éclairer votre lanterne et dissiper certaines nappes de brumes qui peuvent l’être, tout ou partie…

Ces contenus sont adaptés à tous les âges et savent utiliser les mots justes pour vous aider dans cette tâche ardue que l’apprentissage et « l’apprivoisement » de la mort.

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Au détour d’un deuil qui frappe au cœur, l’adulte a parfois tendance à vouloir surprotéger l’enfant, et pour ce faire il va tout mettre en œuvre pour dissimuler sa peine et ses états d’âmes ; sachez que cela n’est pas une bonne façon de procéder.

Tout d’abord, quoi que vous en pensiez, ne vous leurrez pas, un enfant est à même de percevoir la tristesse et le désarroi de ses parents lorsque ceux-ci en souffrent, fussent-ils de très bons comédiens… Ce n’est pas forcément un très bon exemple que de vouloir occulter la réalité des choses, surtout lorsqu’elle génère une peine qui est plus que légitime. La moindre inflexion dans vos attitudes, dans votre comportement, sera interprétée et le mieux est de ne pas laisser le doute ou l’incompréhension s’installer, alors ne cachez pas les choses et parlez de la situation que vous vivez, mettez des mots sur ce que vous ressentez.

C’est en agissant de la sorte que vous pourrez rassurer votre enfant et dans un même temps lui faire intégrer ce que vous traversez, qui est le lot de tout un chacun à un moment donné de sa vie ; il s’agit de ne pas amener l’enfant à plus ou moins fantasmer des réponses  et des causes qui ne seraient pas les bonnes.

En outre, vous permettrez aussi d’éviter qu’il ne se sente comme tenu à l’écart et il n’est pas nécessaire de s’épancher en longs discours pour cela, quelques mots simples et une marque de tendresse et d’affection seront alors vos meilleurs alliés. Votre enfant aura besoin que vous lui témoigniez ce genre de signes de confiance, et cela lui sera d’une grande aide pour la suite de son existence ; il sera mieux armé pour poser des mots sur son ressenti profond, sur ses émotions et pour quelque part, apprivoiser ces dernières.

Pour finir là dessus, en cas de deuil très proche, qui impacte l’un des deux parents de façon terrible au point qu’il soit littéralement effondré de chagrin, il ne faut pas se tromper de priorité et commencer par s’occuper de soi… Ne vous méprenez pas, le message pour l’enfant sera très positif, et en aucun cas égoïste, car il comprendra que lorsque l’on est vraiment dans une douleur aiguë, alors il faut commencer par redresser la barre pour soi-même.

Dans cette situation, essayez de ne pas tout affronter de front, vous n’en aurez sans doute pas la force ni l’énergie, ne soyez pas honteux à l’idée de solliciter l’aide d’une tierce personne, un conjoint, un parent, un ami…

Trop souvent, les parents veulent avoir cette image d’Epinal selon laquelle ils sont « insubmersibles » et tanguent à peine alors que gronde l’orage et monte la houle des événements funestes de la vie… Il faut éviter de tomber dans cette caricature qui au final, ne servira ni l’adulte, ni l’enfant : vous n’êtes pas un héro de film, vous ne savez pas tout faire, vous ne pouvez pas tout gérer de front en faisant invariablement bonne figure, vous êtes faillible,…vous êtes Humain !

Dans le prolongement de ce qui vient d’être dit, souvent se pose la question de savoir  si la place d’un enfant est d’assister à l’enterrement, auprès de ses proches lorsqu’un membre de la famille décède (un arrière grand parent, une grand-mère, un grand père, une tante, un oncle…), la réponse est « Oui », sans détour.

S’il ne faut pas attendre d’un enfant qui ait nécessairement des comportements ou des paroles « adaptées » ou simplement « mesurées » dans ces moments-là, il faut bien comprendre qu’en aucun cas cela ne doit être interprété au spectre de l’entendement d’un adulte… Il faut laisser à l’enfant ce qui fait sa singularité, son mystère, son impalpable raison et sa sensibilité, sans chercher à tout prix à le faire ressembler à un petit adulte endeuillé, qu’il n’est pas.

Néanmoins, une fois que nous avons dit cela, le monde des pédopsychiatres considère que d’assister à un enterrement permet d’associer l’enfant au deuil d’une certaine manière et l’aide à affronter la dure réalité des choses, engoncé dans le cocon protecteur et empathique des membres de la famille et des proches présents ce jour.

Lors des funérailles, il est primordial que le petit être sente que le noyau dur fait corps autour de, et avec lui ; il faut qu’il fasse l’expérience des gestes tendres, des paroles réconfortantes et des sourires comme des larmes, car c’est dans un sens une sorte de condensé de ce que l’existence offre de plus chaleureux mais aussi de plus difficile à vivre.

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Soyons clair à ce sujet, laisser son enfant tout seul à la maison ou le confier à des amis non concernés (ou si peu…) par la perte d’un être cher, et cela alors que tous les membres de la famille font bloc en se serrant les coudes et rendent un dernier hommage au défunt, n’a strictement aucun fondement, ni aucune valeur « vraie » de ce qu’est ou doit être la coexistence et l’empathie humaine.

Bien que l’on ai longtemps considéré, sans doute un peu à tort, qu’il fallait quoi qu’il en coûte tenir l’enfant hors de ce cercle parfois éploré que constitue les funérailles d’un proche, il faut bien convenir que cela revient peu ou prou à surprotéger le petit être en construction, ce qui le desservira lorsqu’à son tour, invariablement et inéluctablement, il devra bel et bien faire face à ce que la réalité propose de plus triste au cours d’une vie…

C’est quelque part une sorte de mensonge non prononcé, mais délivré dans les faits sans en avoir l’air, un peu comme si l’on inventait un second Père Noël pour édulcorer ou faire passer la pilule de sa disparition, une fois que les coulisses du premier auront été éventées.

L’enfant est lui aussi en droit de partager ces moments, de pleurer, de se fabriquer un pan de souvenir autour d’un être qu’il ne reverra plus en chair et en os mais qui a compté parfois plus que certains qui sont toujours bien vivants, et l’enfant est aussi en droit de faire son deuil à son tour, dans lequel, bien entendu, vous l’accompagnerez…

Sans ce vécu là, sans ce qui fait aussi l’essence de la vie, si merveilleuse parce que sans doute si fugace, comment pourrait-il à son tour se construire et permettre à sa descendance, lorsque le jour viendra, d’affronter l’expérience du monde et de son inexorable cours du temps tels qu’ils sont, dans toute leur splendeur parfois irrationnelle, et dans tout ce qu’ils ont d’impitoyables ?

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Bernie
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Moi, c'est Bernie. Incubateur d'actualités pour vous informer autrement.

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6 commentaires

  1. Quand mon mari est mort les petits enfants étaient grands donc nous n’en avons pas parlé ou un peu sans traumatisme. J’avais un arrière petite fille de 5 ans et je lui ai parlé de la naissance et de la mort mais aussi qu’il reste des photos, vidéos etc… Pour ne pas être triste et revoir les bons moments.

    • That’s right, baby is more bébé, enfant is child the topic of this is « how to speak of the Death to children »

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