Tutoyer ou vouvoyer ? Bien plus qu’une règle de politesse

Le vouvoiement, c’est dire « vous » et le tutoiement, c’est dire « tu » à une personne, est bien plus qu’un concept grammatical, c’est un vrai choix sociétal fort.

Tutoyer ou vouvoyer ? Un vrai choix.

Alors que l’été favorise les rencontres, même si elles sont masquées et avec une distance sociale, la manière d’aborder une personne, reste une particularité très francophone, allons-nous entamer la discussion par un « tu » ou par un « vous » ?

Nos amis anglophones n’ont pas ce choix linguistique, et cela change certainement la culture et l’éducation. Pour nous les petits Français, en tout cas à mon époque, nous avons appris que le vous devait être utilisé quand on s’adresse à :

  • une personne inconnue,
  • une personne plus âgée,
  • une ou un supérieur(e) hiérarchique,
  • une ou un collègue de travail,
  • une vendeuse ou un vendeur dans un magasin,
  • une personne représentant une administration

Une liste qui n’est pas exhaustive, et à laquelle il faut ajouter cette subtilité de la langue française où le vous doit être utilisé lorsque nous nous adressons à un groupe de personnes et exprimer ainsi le pluriel.

Le passage au tutoiement, tu crois que c’est facile ?

Au-delà de la technique qui consiste à dire à la personne qu’elle peut vous tutoyer et que ça ne vous dérange, une technique que je vous déconseille, car on vous voit arriver avec vos gros sabots, lorsque tu as commencé un échange avec un vouvoiement, le passage au tu se fait rarement naturellement.

Néanmoins, les règles de politesse, je ne sais plus trop si elles existent encore dans l’éducation (au sens large) aujourd’hui, peuvent exploser en entrant dans le monde professionnel. Pour ma part, en entrant dans la corporation des contrôleurs aériens, j’ai découvert un monde où le tu étais religion. Le tutoiement dans la salle de contrôle était obligatoire faute de se retrouver mis à l’index en cas de vous.

Entre collègues contrôleurs le tu est roi depuis des générations, et est imposé à l’ensemble de la hiérarchie, c’est-à-dire du contrôleur stagiaire au chef de l’organisme. Cette règle, connue dès l’entrée à l’école, amène des attitudes différentes dans la hiérarchie. L’emploi du tu par la hiérarchie pour un rapport plus friendly, n’évite pas le couteau dans le dos à la première occasion. Personne n’est dupe, mais se mettre hors du groupe est un acte plus risqué que de rester un simple mouton.

Au final, le passage au tu exprime, dans une relation saine évidemment, le constat d’un rapprochement dans le cercle des relations. C’est un moment qui est toujours délicat, et qui peut rompre l’équilibre culturel que facilite le vous. N’oublions jamais que le tu est un rapprochement psychologique qui peut déranger l’autre.

Le vous pour garder ses distances.

Dans le monde du travail, mais aussi dans le contexte privé, le vous permet de créer une distance dans la relation. Il permet de créer une bulle virtuelle et ainsi de poser des limites invisibles mais présentes face aux autres. C’est une barrière protectrice.

D’ailleurs, il n’est pas rare dans le monde professionnel, où la distanciation est souvent nécessaire, qu’un conflit entraîne un retour au vous. Ce qui montre bien que le tu était un rapprochement totalement factice. Le vous devient alors une position refuge, et sans doute aurait-il été préférable d’en rester en vous.

Pour autant, l’utilisation du vous peut avoir une connotation blessante. Dans les règles de politesse que je vous ai énoncées au début de cet article, j’ai mentionné l’utilisation du vous lorsque l’on s’adresse à une personne plus âgée. La réciproque pouvant vouloir dire de privilégier le tu, quand on s’adresse à une personne plus jour.

Avec le temps et personne n’y échappe, il arrive un moment de la vie où votre supérieure va être plus jeune que vous. Cela m’est arrivé, et avec ma culture, alors qu’elle me tutoyait, j’ai continué à employer le vous.

 S’agissait-il d’une politesse exagérée ?

Même si elle était naturelle de ma part, ma cheffe m’a un jour fait remarquer que cela renvoyait d’elle l’image d’une femme plus mûre (vieille ?) et donc qu’elle apprécierait de ma part un passage au tu… Une situation que je médite encore parfois…

Finalement, il n’existe pas de règle écrite dans le monde professionnel. Il est essentiel de prendre en compte le contexte de l’entreprise, et surtout ne pas considérer que le tu est une invitation à passer ou tutoiement. Restez vous, et surtout ne te forces pas à tutoyer.

Le tu, un effet de mode dans la blogosphère.

L’objectif d’un blog, ou d’une publication sur les réseaux sociaux, est de créer de la proximité entre le blogueur et ses lecteurs, afin d’établir une ambiance d’échange moins formelle, plus décontractée, de favoriser l’esprit de partage et le sentiment d’appartenance à une communauté.

Aujourd’hui, le « tu » est donc à son apogée et devient une mode. Il est censé donner une image dynamique et jeune, des blogueurs qui l’utilisent.

Avec l’aplatissement des barrières et la recherche extrême de convivialité, le « tu » est là pour construire et renforcer la fidélisation. Attention cependant, le vouvoiement reste une valeur sûre qui va au-delà d’un effet de mode.

Chacun fait son choix de sa ligne éditoriale, pour ma part, je considère que le vous exprime plus de vrai et de sincérité qu’un tu de circonstance. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de rencontrer une blogueuse, que je ne nommerais pas, dont le tu est une signature éditoriale, mais qui dans la vraie vie ne sort pas du vous… A méditer ?

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Et vous, quel est votre avis sur le tutoiement et le vouvoiement ? Quand passez-vous au tu ?

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Bernie
Bernie

Moi, c'est Bernie. Incubateur d'actualités pour vous informer autrement.

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34 commentaires

  1. Personnellement, dans la rue, spontanément, je vouvoie les hommes, mais je tutoie les femmes

  2. De base, je vouvoie sur la blogo, sauf si la personne me tutoie. Pas évident.
    Après, en « vrai », ça dépend de la personne. Je vouvoie en général, mais si je vais être amenée à beaucoup travailler avec la personne, je tutoie. Pour mon conjoint, c’est l’inverse : il tutoie tout le monde. Et créé facilement des liens ! Et si c’était là, la clef ? Oser tutoyer…

    • Merci pour ce commentaire très intéressant qui montre combien notre culture française est complexe et sans doute difficile à comprendre pour les étrangers.

  3. Choisir, tout est là ! Ne rien se laisser imposer sur plan des usages, ni le tutoiement d’un égal, ni à plus forte raison celui d’un supérieur.

  4. Moi je préfère le vous, mais parfois avec des clients , le tu est demandé est j’ai quelques soucis, mais bon c’est à faire ou faire plaisir à l’autre

  5. Puisque tu pose la question il me semble que le tu est plus sympathique et donne une intimité, contrairement au vous qui érige une barrière. Je préfère être tutoyer et sur le blog tutoie tout le monde. Par contre il est des personnes que je peine a tutoyer, notamment les plus âgés que moi. La bienséance veut que l’on disent vous a certains haut placés mais a part le statut qu’on t-il de plus? Dans le milieu de la conduite professionnel et en Afrique le tu est de rigueur et c’est tant mieux….Voilà

  6. Oh la la, quand on est de ma génération (j’ai 70 balais).. c’est compliqué quand même.. Je n’ai pas vraiment d’avis.. enfin si.. je crois que c’est différent selon qu’on parle de la vraie vie, ou de la « blogosphère ».. Quand on me parle de ce sujet, je pense toujours à ma famille, et mon usage depuis toute petite, du « tu » ou du « vous » selon… Ma grand-mère paternelle avait 6 soeurs.. que je voyais plus ou moins, les 6 selon qu’elles étaient proches ou moins, mais les relations étaient les mêmes.. Certaines je les ai toujours tutoyées et d’autres toujours vouvoyées.. Je me suis toujours demandé pourquoi.. le feeling ? J’ai toujours vouvoyé mes beaux-parents, mon mari en faisait de même avec mes parents. Je tutoie mes gendres et belles-filles, de même ils me tutoient (je mets au pluriel car même si je n’ai que 2 enfants, j’ai eu plusieurs « gendres » et « belles-filles »). Question de génération ? on se respecte tout autant.. Côté boulot.. dans les 3 premières entreprises où j’ai bossé, c’était le « vous » hiérarchique, évidemment.. et le « tu » avec les collègues de bureau seulement. Dans les 70’s, c’était comme ça.. Dans la dernière où j’entrais en 1982.. j’étais amie avec le patron (et sa famille) avant qu’il m’embauche.. En plus j’étais sa première secrétaire, j’entrais dans une boite de mécanique, que des mecs (10) ! Seule nana ! A l’atelier ce fut le « tu » rapidement, je n’aurais pas aimé rester comme au premier jour, « la secrétaire du patron ». J’étais une employée comme eux.. Ça n’a pas été facile à gérer.. On a été longtemps « une bande de potes » avant que l’entreprise grossisse et se structure en passant de 10 à plus de 100 salariés.. Sur la blogosphère et les réseaux sociaux, je suis le mouvement et c’est le tutoiement qui l’emporte, bien sûr.. pas vraiment de distanciation.. Quant au respect ? Est-ce que ça existe encore ? Un truc qui m’amuse.. retrouver des gens que j’ai connus dans la vraie vie avant internet et que j’y retrouve maintenant.. comme l’instit de ma fille, que je n’aurais jamais vouvoyée dans la vraie vie et que je tutoie sur FB.. D’autres personnes je les vouvoie comme avant.. 😉 J’ai été un peu longue, là, non ?

    • Ton témoignage est très intéressant, et il méritait cette longueur pour être complet. Nous sommes presque de la même génération, et je me retrouve dans beaucoup de tes exemples. Je n’ai jamais tutoyé mes beaux-parents par exemple.
      Sur le blog je vouvoie dans les articles, mais je tutoie dans les commentaires… En tout cas merci pour ce complément très riche.

  7. Ah vaste questionnement avec l’emploi du tu et du vous . Dans le cadre de travail , l’emploi du tu entre collègues était de rigueur par contre pour la hiérarchie j’ai employé le vous excepté pour une personne qui préférait le tutoiement , mais j’avoue j’avais beaucoup de mal . Dans la blogosphère le tutoiement se fait presqu’ automatiquement . Dans certains défis , si je ne connais pas bien la personne, je reste neutre en m’abstenant dans le commentaire de tu et de vous , ne sachant pas quelle attitude adopter . En général dans la vie courante je passe au tu quand je la connais mieux et jamais sans demander à moins que ce soit la démarche inverse que ce soit elle qui demande .
    Bonne journée
    Bises

  8. J’ai toujours tutoyé facilement mais si je me trouve devant une personne qui préfère le vouvoiement cela ne me dérange pas. Jai demandé à mon gendre et belle fille de me tutoyer ainsi qu’aux conjoints des petits enfants et ils me respectent. Par contre je ne force jamais et mon voisin à la campagne je le vouvoie alors qu’il voulait que je le tutoie et lui me vouvoie à cause de la différence d’âge et ça je ne peux pas !

  9. Bonjour Bernie. J’ai apprécié ton article. J’utilise le « vous » pour les raisons que tu cites qui m’ont été inculquées. Je rajouterais les clients et les fournisseurs avec qui utiliser le « vous ». J’ai toujours gardé le « vous » pour mes supérieurs en milieu professionnel. Sur la blogosphère j’utilises le « tu » sauf avec ceux qui préfèrent le « vous ». Bonne journée

  10. professionnellement , j’ avais remarqué que le vous était de rigueur du moins au départ, sauf en Belgique , où le tu est naturel, ce qui n’empêchait nullement de se faire respecter
    Bonne journée Bernie

  11. Sur mon blog, je tutoie automatiquement car je ne sais rien sur la personne et c’est un lieu convivial où tout le monde est à égalité.
    Dans mon travail de CNS, tous les vendeurs se tutoyaient entre eux mais on vouvoyait toujours les clients, bien sûr.
    En entreprise, ce fut différent, on disait vous à tous les supérieurs mais tu à tous les collègues alors qu’on vouvoyait tous les ouvriers afin de ne pas les « rabaisser » !
    Mais, en général, je tutoie facilement.
    Je te souhaite un bon début de semaine en espérant que tu ais passé un bon week-end.
    On est repartis pour avoir encore un pic de chaleur dans quelques jours …
    La sécheresse devient un vrai problème.
    Gros bisoux, cher bernie.

  12. j’ai tendance à tutoyer, mais peut-être pas dès la première rencontre…..et j’attends de savoir si la personne que je côtoie a autant de facilité que moi….mais le tutoiement n’empêche le respect et la politesse envers autrui….douce journée à toi

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