Tu viens, Harold !

Quand Paula avait décidé d’aller jouer au casino, il fallait y aller ! « Harold au Casino » une micro-fiction signée Yves Carchon.

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Courtesy © Bernieshoot

HAROLD AU CASINO

Quand Paula m’a montré sa culotte, j’ai vite compris le sort qui m’attendait. Avec elle, c’était net ! Pas de minauderies, ni de désir voilé par la pudeur des mots !

Pas même question de préparer la table avec couverts d’argent et carafe en cristal !

Ni d’aller au théâtre ou même de bavarder lascivement à la terrasse d’un bistrot ! Non !

Quand Paula avait décidé d’aller jouer au casino, il fallait y aller !

Se changer aussitôt (d’où la culotte qu’elle agitait comme un petit drapeau, que j’associais au féminisme révolu des années 70). Moi, j’enfilais négligemment un smoking démodé ; Paula, une robe de soirée ouverte dans le dos jusqu’à l’orée des fesses.

En riant dans la glace, elle se peignait les lèvres, puis nouait mon nœud pap en me baisant la joue. « Tu viens, Harold ! »

Elle m’appelait Harold en souvenir d’un personnage de BD qui, disait-elle, avait ma tête. Et je lui répondais, en souvenir sans doute de Peter Cheney : « J’arrive, poupée ! ».

J’en tâtais ma poche gauche de veston afin de m’assurer que mon flingue était là. Là-dessus, elle me confiait les clés de sa décapotable et nous suivions le front de mer en sifflotant O Solo mìo.

La nuit était tombée ; derrière le port, la mer jouait avec les flaques des enseignes. Une flottille de yachts se balançait dans l’air du soir.

Au casino, Paula et moi étions reçus comme des papes. On arrosait copieusement croupiers et personnel, faut dire !

Après, quand on était vraiment à sec, on terminait au bar. Le casino bientôt fermait.

Dans la voiture, comme on rentrait, Paula baillait.

« Tu sais ce que j’attends de toi, Harold ? » Ah ça, je le savais !

« Que je te fasse une tisane avant dodo ? »

 « Harold, voyons ! Tu sais très bien que je déteste la tisane ! »

« Je vois. Que je te fasse couler un bain, alors ! »

 « Harold ! »

« OK, promis ! Mais je suis loin d’être très frais ! »

« Ça, c’est toi qui le dis ! ».

Une fois rentrés, on se couchait, se collait l’un à l’autre et c’était elle la première qui s’endormait. Comme je fermais les yeux, je me jurais de lire cette foutue BD où il était question du drolatique Harold qui était seul à partager peut-être les songes de Paula.

auteur yves carchon

Une micro-fiction signée Yves Carchon écrivain, auteur de « Riquet m’a tuer » et de « Vieux démons« 

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