Ce samedi 13 mars 2021, la décision de la Commission européenne dans le litige qui oppose le Conseil de régulation de la Tequila (CRT) et l’entreprise Heineken, impactera d’une manière ou d’une autre, tout le système de protection des appellations d’origine.
Le Conseil de régulation de la Tequila exige de Heineken le respect de l’indication géographique dans sa bière "Desperados"
GÉNÉRICITÉ ET DÉGÉNÉRESCENCE DES IG : UN RISQUE POUR L’ENSEMBLE DES APPELLATIONS RECONNUES AU NIVEAU EUROPÉEN
Première IG mexicaine reconnue au niveau européen en 2019, la tequila fait aujourd’hui face à plusieurs procédures judiciaires tendant à faire valoir ses droits, nouvellement acquis pour protéger son appellation sur le territoire de l’Union européenne.
Ces procédures, portant sur une utilisation dénaturée de la tequila, « ouvre la porte à la contrefaçon de tout autre produit protégé et à la création d’un produit générique ».
Ainsi, c’est conscient du risque pesant sur l’ensemble des IG spiritueux reconnus à l’échelle européenne, que 40 associations, organisations et institutions du secteur des spiritueux, dont le BNIC ( Bureau National Interprofessionnel du Cognac), ont apporté leur soutien au Conseil de régulation de la Tequila (CRT), demandant à la Commission européenne d’être partie prenante aux investigations en cours*
Il y a deux ans, en 2019, la Commission européenne (CE) reconnaissait la Tequila comme Indication géographique (IG), ce qui en fit le premier produit mexicain à accéder au plus haut modèle de protection en Europe.
Malgré cela, la Tequila doit faire face à plusieurs batailles juridiques dans l'Union européenne pour se défendre contre la société transnationale Heineken, qui depuis plusieurs années utilise de manière abusive et non-autorisée l’indication géographique Tequila, en dénaturant la boisson mexicaine par excellence pour la transformer en goût/saveur ajouté(e) dans sa bière Desperados.
Deux des procédures judiciaires, initiées en 2017, sont actuellement en cours devant les tribunaux d'Amsterdam, aux Pays-Bas, et de Nanterre, en France ; cette dernière avec une décision favorable pour la Tequila.
Début 2020, le Conseil de régulation de la Tequila (CRT), agissant conformément à ses fonctions et à la réglementation mexicaine, et après avoir reçu des preuves démontrant de manière fiable l’utilisation dénaturée de la Tequila, n'a pas été en mesure de délivrer des certificats d'authenticité pour l'exportation de la boisson à l'entreprise productrice qui fournissait une filiale de Heineken, simulant des exportations d'origine conditionnées au consommateur final.
En conséquence, au milieu de l'année 2020, la brasserie néerlandaise, par l'intermédiaire de l'Association des brasseurs européens, a dénoncé le Mexique pour "obstacles techniques au commerce" devant la CE.
Cette investigation a été publiée au Journal officiel de l'Union européenne le 13 août 2020. Lors de la publication de cette procédure, et dans un acte sans précédent de soutien au gouvernement du Mexique, à la CRT, à la Tequila, et à l'ensemble du système de protection des Indications Géographiques de l'UE, 40 lettres d'associations du secteur des spiritueux et d'organisations et institutions internationales représentant les plus importantes appellations d'origine européennes telles que le Bureau Interprofessionnel du Cognac, la Scotch Whisky Association, Origen Espagne, le Consorzio Parmigiano Reggiano, pour n'en citer que quelques-unes, ainsi que d’institutions académiques ont été présentées à la Commission européenne en demandant d'être parties concernées dans le processus.
Ce conflit ouvre la porte à la contrefaçon de tout autre produit protégé et à la création d'un produit générique. Une décision défavorable dans cette enquête affecterait la première Indication Géographique Protégée du Mexique, affaiblirait l'ensemble du système de protection et de contrôle des IG et la crédibilité de l'Union Européenne dans ce modèle.
Il est prévu que cette procédure d'enquête soit finalisée avant la signature de l'accord de libre-échange modernisé entre l'Union européenne et le Mexique (ALE UE-Mexique), dans lequel l'UE a demandé, dans le chapitre sur la reconnaissance et la protection de la propriété intellectuelle au Mexique, la reconnaissance de plus de 340 appellations d'origine et indications géographiques dans la région.
Pour leur part, les autorités mexicaines, en particulier le ministère de l'économie dirigé par sa directrice Tatiana Clouthier et son équipe, ont exprimé leur plein soutien à la Tequila, s'engageant à joindre leurs efforts pour défendre l'une des icônes de l'identité mexicaine, et à respecter le travail et la tradition d'une industrie composée de 163 entreprises productrices de Tequila, de plus de 19 000 producteurs d'agave et de 70 000 familles mexicaines qui dépendent de cette agrobusiness.
Actuellement, la Tequila est protégée dans 55 pays au total, dont les États-Unis et l'Union Européenne, où, en plus d'être reconnue comme Indication Géographique Protégée (2019), elle bénéficie de l'Accord entre le Mexique et l'UE sur la reconnaissance mutuelle et la protection des appellations d'origine dans le secteur des spiritueux (1997), de l'enregistrement en tant que marque collective "Tequila" auprès de l'Office de la propriété intellectuelle de l'Union européenne (OMPI) (2008) et d'une protection spécifique en matière douanière (2013).
(*) Règlement concernant la définition, la désignation, la présentation et l’étiquetage des boissons spiritueuses, l’utilisation des noms de boissons spiritueuses dans la présentation et l’étiquetage d’autres denrées alimentaires, la protection des indications géographiques relatives aux boissons spiritueuses, ainsi que l’utilisation de l’alcool éthylique et des distillats d’origine agricole dans les boissons alcoolisées
avec cette course à la mondialisation, c’ est important
Il faut protéger les appellations d’origine