Un jour, c’est promis, je n’écrirai plus. Plus besoin!… "C’est parfait, le haïku"  voici une nouvelle qui signe le grand retour de notre ami Yves Carchon.

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C’est parfait, le haïku

Comment vous expliquer ça ?

Je suis devenu si paresseux que j’ai décidé d’écrire la moitié des mots. Et vous me croirez ou non, mais ça marche ! On me lit facilement, sans problèmes. Je n’ai donc plus qu’à écrire à minima ! Le reste s’écrira tout seul dans la tête du lecteur.

Mais si, bien sûr que ça marche !

Un jour, c’est promis, je n’écrirai plus. Plus besoin.

Etant parvenu à une sorte d’épure, comme les haïkus des Japonais, je serai enfin tranquille. Peut-être même que mes lecteurs auront compris enfin que précisément ce sont eux, seulement eux, les auteurs de mes textes, non moi.

Un jour, ce fut la première alerte, un lecteur me raconta mon livre. J’eus beaucoup de mal à reconnaître qu’il était mien.

En fait, il n’était plus mien — l’avait-il jamais été ? — mais sien.

Je veux dire qu’en le lisant, l’ayant lu avec ses souvenirs, ses hantises, ses peurs tout intimes, il l’avait créé. Il s’était approprié le texte, à bon droit pour un lecteur, et en avait fait une aventure sienne. Il l’avait sans doute incorporé à sa propre vie, comme de nombreux livres que nous lisons.

Une autre fois, une lectrice me dit qu’elle préférait une autre fin à mon roman. La sienne. Elle me la lut. Je l’écoutai.

Mais oui, sa fin était cent fois meilleure ! Je contactai mon éditeur : impossible de rattraper le coup.

Aussi, ma résolution est-elle prise : je n’écrirai plus que la moitié, voire le quart de romans désormais : au lecteur de faire le reste, il s’en sortira très bien.

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Patville, un feuilleton signé Yves Carchon, écrivain, auteur de "Riquet m'a tuer", de "Vieux démons", de « Le Dali noir », et de son nouveau polar « Le sanctuaire des destins oubliés »

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