Personne n’attend personne.
On se croise, se parle, se côtoie.
On tente de connaître l’autre.
On se partage un soir une cigarette en bavardant sur le pas d’une porte.
On se sourit, on sait qu’on va le faire, mais on ne sait pas quand, ni où. On se saoule de mots. Aucun des deux n’est dupe.
Mais c’est ainsi : il faut s’apprivoiser. On se retrouve un autre jour devant un cinéma ou un kiosque à journaux (je sais, on n’en trouve plus), on change d’avis et on décide d’aller manger.
On a faim quand on aime. Amoureux ?
Voire… Quelque chose nous dit que l’autre a une histoire à raconter, que c’est toujours ainsi : se raconter est le début de tout. Le moment où on s’abandonne, où on se livre, s’enivre de ce que l’autre dit ou simplement parce qu’il hoche la tête, a-t-on idée de faire l’intéressé, ça pourrait être grotesque…
Mais on finit dans un deux-pièces, généralement sous les toits, il y fait froid l’hiver, mais on s’en fout. On s’y niche, s’y immerge, même l’été quand le soleil est chaud et qu’il accable la verrière où le ciel joue du bleu.
On s’aime enfin, vraiment ! Pas besoin de dessin.
On se cherche et se guette les jours suivants l’incandescence.
On se regarde, se mange des yeux. On rit à gorge déployée.
Nous voilà au sommet de l’amour. Comment s’enclenche le retrait des eaux, la marée basse ? Mystère. Bientôt on voit moins l’autre, on s’en sépare sans le savoir…
Il n’y a pas d’amour heureux, dit le poète.
Qui vous parle d’attendre ?
Personne n’attend personne.
Une nouvelle signée Yves Carchon, écrivain, auteur de "Riquet m'a tuer", de "Vieux démons" et de « Le Dali noir »