Confessions de Juliette, ex escort girl

Juliette ? Un prénom bien romantique, me direz-vous ? Et pourtant, c’est le « nom de guerre » d’une ancienne escort. Une prostituée, plus ou moins de luxe. Bien que je puisse adhérer à ses propos, liberté d’expression oblige, il me fallait venir à sa rencontre…

juliette escort girl

Virginie Vanos : Bonjour Juliette, je te nomme sous ton ancien « nom de guerre », comme tu dis. Est-ce que cela te pose problème d’évoquer ton passé en tant d’escort ? Comment es-tu arrivée à ce choix ?

Juliette : Non, pas du tout.  J’avais 28 ans au décès de ma mère. Mon père vit toujours, mais il est placé dans une institution depuis un accident vasculaire qui l’a laissé handicapé à vie. Je me considère donc depuis longtemps comme 100% orpheline.

Ma mère était juste ma génitrice. Dès que j’ai commencé à sortir avec des garçons (et parfois aussi des filles), vers 17-18  ans, elle a commencé à être infâme avec moi.

Trainée, putain, enculée, suceuse, nymphomane, perverse, j’avais droit tout le temps à ce genre d’insultes. J’étais un peu rock, oui, mais je ne m’en suis pas cachée et je restais dans certaines limites. Mes études n’en ont pas souffert. Et j’ai un bac +5 !

Je crois que ma mère était jalouse car elle se voyait vieillir alors que je  devenais de plus en plus belle dès que j’ai dépassé la  puberté. Quand ma génitrice est morte et que j’ai hérité, je n’arrêtais pas de me souvenir de ce qu’elle disait aussi sur le pognon.

Que sans son fric, je ne serais rien, je n’aurais rien. Elle avait menacé plusieurs fois de tout léguer à des œuvres. C’était des menaces en l’air.

J’ai bien hérité de plusieurs dizaines de milliers d’euros et de deux F2.  J’étais dans un drôle d’état, entre la  colère et l’amertume. J’ai alors décidé de me lancer dans l’escorting.

Je voulais gagner l’équivalent de mon héritage par mes propres moyens. Mon boulot normal ne me suffisait pas, alors j’ai commencé à poster des annonces. Dès la première heure, j’ai eu des demandes. Je me suis donné deux ans pour avoir sur un compte épargne plus que ce que ma mère m’avait laissé.

 

VV : Tu considères cela comme une vengeance ? Comment se sont passées les premières fois ?

Juliette : Plutôt un acte de rébellion. Je ne voulais pas être victime du fantôme de ma mère. Les premières fois, il n’y en a pas eu.

J’avais déjà fait ça avec une copine quand j’étais à la fac. On pouvait se faire à deux 5 clients par jour.

Mais l’autre nana a commencé à déconner, elle se siphonnait au bout de 5-6 mois une bouteille de rouge et un paquet de clopes par  client. Ca m’a dégoûtée grave, j’ai arrêté à ce moment-là.

Entretemps, j’avais gagné de quoi me payer des vacances pendant trois étés. J’ai été à Aruba, en Jamaïque et en République Dominicaine avec l’argent gagné  « en duo ». J’ai tout claqué là-bas. 6-7 ans plus tard, mon but était d’épargner.

Le deal était simple : 150 euros la passe. Frais d’hôtel à charge du client. Pas de marchandage, jamais chez eux, jamais chez moi.  Ni  films, ni photos.

Grand maximum 2 heures de présence.

J’acceptais aussi les trios, 200 euros si le troisième était une femme, 250 si c’était un homme. 300 si la nana ou le mec était moche ou craignos.

Et il fallait que ce soit en dehors de mes horaires de bureau. A la fin de la première année, c’était presque un client par soir, jusqu’à 7 le week-end.

Les jours fériés, ou de congé pour moi, entre  2 et 4.

virginie vanos nu © Pascal de Lattre
© Pascal de Lattre

VV : L’as-tu caché à tes proches ?

Juliette : Bien sûr que oui.  Ni mon demi-frère, ni mes amis et encore moins mes collègues n’ont jamais rien su.

Vu que je ne sortais plus avec eux, que je ne participais plus à rien, j’ai dû inventer une explication. J’ai dit que je donnais des cours de maths à domicile. Et que j’avais rencontré un mec qui était ultra-possessif.

Je me suis organisée très rapidement.

J’ai créé une adresse mail au nom de Juliette, acheté un second téléphone. J’ai même pris la pilule en continu pour ne pas avoir de règles, pour être disponible tout le temps.

Enfin, je n’ai plus été chez le gynéco. Je ne voulais pas qu’il voit si j’avais des lésions vaginales ou anales.

Tout était très cadenassé.

 

VV : Combien de temps as-tu vécu cette double vie ? Et comment et pourquoi as-tu arrêté ?

Juliette : Un peu moins de trois ans.

Au départ, je trouvais ça super motivant. J’étais excitée dans tous les sens du terme quand je me rendais à un rencard. Je me faisais en trois jours ce que mon boulot normal me payait en un mois ! Je ne te parle même pas de la sensation de liberté absolue !

Et comme je choisissais bien mes clients, j’avais plus l’impression d’être une geisha de luxe qu’une tapineuse de rue.

Mais un jour, alors que je prenais un taxi pour aller à un rendez-vous, j’ai eu subitement super mal au dos. J’ai annulé en dernière minute (le mec était furax) et j’ai appelé un médecin de garde quand je suis rentrée chez moi.

J’avais une infection urinaire. Sans doute à cause du train où j’allais.

La toubib m’a prescrit des antibios et des antidouleurs.

Pendant ces 10 jours d’arrêt forcé, je me suis quand même demandé si j’allais continuer. J’avais déjà largement gagné plus que l’héritage de ma mère.

J’avais alors décidé de continuer pour gagner l’équivalent du prix d’achat des deux apparts. J’ai donc repris dès que j’étais guérie.

Au même rythme et avec le même type de contrat. Deux mois plus tard, j’ai encore eu une infection urinaire. Ça a été le même topo.

Je crois que j’en ai fait 8  en moins d’un an.

Et puis, j’ai découvert que j’avais chopé une MST. Je n’étais pas choquée, mais je trouvais l’odeur dégueulasse. J’ai donc cessé. Enfin, presque.

 

VV : Que veux-tu dire par « Enfin, presque » ?

Juliette : J’ai cessé plein-temps.

Mais dès que je veux me payer un truc un peu cher, des soins cosmétiques, des fringues, des vacances, etc.…. Je crée une nouvelle adresse mail, je prends un autre avatar et je fais des rencontres pendant une semaine ou deux.

Je prétends alors être étrangère (souvent italienne, vu que c’est ma deuxième langue), escort occasionnelle et que je fais pour m’amuser durant mes vacances. C’est comme ça que j’ai pu me payer ma véranda.

 

VV : Et l’amour, dans tout ça ?

Juliette : Me ranger pour de bon, avoir un homme à domicile, voire des enfants, c’est NON. Je suis tombée amoureuse d’un de mes clients lors de ma seconde année « à temps plein », ça a failli marcher, puis il a cessé les rencontres pour se marier avec une nana « correcte ».

J’ai cru que j’allais crever quand il m’a recontactée quatre ans après. Il avait déjà deux garçons. Alors que j’avais été amoureuse de lui comme une dingue, je me suis mise à les haïr, lui, sa bonniche et leurs bâtards. J’ai la rage, mais ça m’a servi de leçon.

 

VV : Pour conclure, que souhaiterais-tu dire aux femmes qui envisageraient l’escorting ? Et à ceux qui condamnent ton choix ?

Juliette : Même discours pour tout le monde : l’escorting, c’est un choix comme un autre. On n’a qu’une vie et si on a envie de disposer de son corps comme ça et de s’en servir pour vivre mieux, on en a le droit !

 

* VV : Virginie Vanos

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Virginie Vanos © Marc Naesen

Entretien – rencontre avec Juliette, ex escort girl belge  réalisé par Virginie Vanos

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8 commentaires

  1. Terrible et boulversant témoignage d’une jeune femme qui a introjecté le contrôle de sa mère et
    dont la trace reste relativement prégnante dans son inconscient…

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