Interview de Bernard Minier

Suite à la rencontre avec Bernard Minier lors du 6ème festival international des littératures policières de Toulouse (organisé par Toulouse Polars du Sud), Bernieshoot vous propose aujourd’hui une interview pour en savoir plus sur le père de Martin Servaz.

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Bernard Minier

Rencontre

J’ai eu le plaisir de rencontrer Bernard Minier lors du 6ème festival international des littératures policières de Toulouse (organisé par Toulouse Polars du Sud). Auteur dont j’avais déjà lu les droits premiers romans Glacé, Le Cercle et N’éteins pas la lumière (publiés chez XO Edtions et chez Pocket Editions).

Si vous n’avez pas encore lu un de ces droits romans courrez chez votre libraire et si vous les avez déjà lus alors j’espère que tout comme moi vous apprécierez d’en connaitre un peu plus sur Bernard Minier.

 

Interview

Martin Servaz, héros de vos trois premiers romans

Bonjour Bernard, le commandant Martin Servaz, héros de vos trois premiers romans, comment l’avez-vous rencontré ?

Bonjour.

Dans la brume : celle d’où il est sorti progressivement avec Glacé. Au début du livre, j’avais cette scène du cheval que beaucoup de gens connaissent, un décor, le personnage d’Hirtmann et celui d’Irène Ziegler mais Martin, lui, n’était qu’une silhouette, un flic venu de Toulouse, dont tout ce que je savais c’est qu’il était mélomane et qu’il aimait en particulier la musique de Mahler, comme son ‘meilleur ennemi’.

La quarantaine, divorcé, une fille… Rien de très original de ce côté-là. Puis, au fur et à mesure de l’écriture, sa personnalité s’est précisée. Aujourd’hui, j’ai vraiment l’impression que ce type existe !

Si vous avez son adresse et son téléphone, merci de me les communiquer : j’aimerais bien discuter avec lui. Parce qu’en vérité je l’adore, Servaz. Même si, physiquement, il a un peu changé depuis le premier bouquin, même si je ne suis pas toujours d’accord avec lui…

 

Quel est l’avenir du commandant Martin Servaz

Quel est l’avenir du commandant Martin Servaz, sa fille sera-t-elle une digne héritière dans un futur roman?

Servaz va revenir dans le cinquième. Il me réclame depuis un certain temps son retour à cor et à cri. Ce sera l’occasion d’une vraie confrontation entre Julian Hirtmann et lui.

Autant dire que je prépare ça comme Mohammed Ali a préparé le combat du siècle contre Foreman : il faut que ça « déchire », comme disent les jeunes.

J’ai un tas d’idées : toutes n’entreront pas dans le canevas – j’en suis au stade où je les examine et je les trie… Quant à Margot, je n’ai pas l’intention d’en faire un personnage de premier plan. Pas dans l’immédiat.

Il y a d’autres personnages intéressants dont j’aimerais parler à l’avenir : Irène Ziegler, Samira Cheung, Espérandieu… Tout comme Servaz, je crois qu’ils ont encore des choses à dire.

 

Les œuvres de Gustav Mahler

La présence des œuvres de Gustav Mahler est intrigante, comment l’avez-vous imaginée?

« La musique seule pose, dans sa pureté dernière, la question du sens de l’existence humaine » : c’est George Steiner qui le dit.

L’œuvre de Mahler a ceci de particulier qu’elle est un pont entre le XIXe siècle et le XXe, autrement dit entre la musique classique et la musique moderne. Mahler lui-même est un musicien dont tout le monde a entendu parler, mais dont fort peu de gens, en définitive, connaissent l’œuvre : plus que n’importe lequel de ses attributs, cette musique dit quelque chose de Servaz, quelque chose d’important : Servaz est un homme écartelé entre deux époques, comme beaucoup de gens de ma génération.

Les bouleversements du monde, nous les observons avec un recul qui fait défaut aux générations actuelles, qui n’ont rien connu d’autres, contrairement à nous. J’ai passé les quarante premières années de ma vie sans Internet et sans téléphone portable, tout comme Servaz, même s’il est un peu plus jeune que moi.

J’en vois à la fois les énormes avantages et les immenses dangers. Par ailleurs, Mahler, c’est une musique assez élitiste, et Hirtmann et Servaz ont, à travers elle, une connexion particulière qui échappe aux autres acteurs de mes romans.

Là encore, je pourrais citer Steiner : « Le carnaval vengeur de la contre-culture voudrait étouffer ce que la pensée comporte inévitablement d’élitiste, d’arrogant, voire d’injuste ».

Je ne suis pas tout à fait d’accord avec ça, mais nul doute qu’Hirtmann, lui, le pense, et c’est pour ça qu’il aime Servaz, bien que celui-ci le traque : parce qu’il le considère comme appartenant au même cercle rare de connaisseurs que lui.

Une longue aventure solitaire

Écrire un roman est-ce pour vous une longue aventure solitaire ?

Oui. Mais je vais vous épargner les clichés sur le sujet. Disons que c’est moins solitaire que quand j’ai écrit Glacé mais, bien entendu, le temps de l’écriture m’appartient toujours à moi et à moi seul.

Je suis mon propre démiurge domestique manipulant les petits egos de mes personnages dans mon laboratoire à idées : une image éculée, j’en conviens, mais vraie.

 

Direction les Etats-Unis

Votre prochain roman va nous emmener aux Etats-Unis, s’évader du Sud-Ouest était-il une nécessité ?

Je ne me suis pas posé la question en ces termes : je fais ce que j’ai envie de faire au moment où j’ai envie de le faire, très égoïstement.

Je ne pense pas à ce que va dire mon éditeur (qui est très enthousiaste, cela dit), ni les lecteurs qui sont fidèles à Servaz et qui, je l’espère, goûteront néanmoins cette parenthèse…

Si l’écriture ne se construit pas sur une envie, un appétit, un besoin, c’est mort.

D’ailleurs, voyez : là, Servaz commence sérieusement à me manquer, lui et ce diable de Suisse, et je trépigne d’impatience à l’idée de les retrouver – ce qui n’aurait certainement pas été le cas à la fin de N éteins pas la lumière…

En attendant, le quatrième, lui, met en scène de tout autres personnages : des adolescents américains vivant sur une île boisée au large de Seattle. L’un d’eux a seize ans, est un enfant adopté, élevé par deux mamans.

Or, à l’autre bout du pays, un homme très riche et très puissant cherche depuis seize ans son fils qui lui a été enlevé à la naissance… J’ai pris énormément de plaisir à écrire cette putain d’histoire.

Je suis très fier de ce texte – au lecteur à présent de juger si cette fierté est légitime…

Biographie de Bernard Minier

Né en 1960 à Béziers. Contrôleur principal des Douanes en disponibilité et écrivain à plein temps depuis le succès de Glacé. Traduit ou en cours de traduction dans 15 langues et une vingtaine de pays, dont les Etats-Unis. Glacé a été salué par le Sunday Times comme l’un des cinquante meilleurs romans policiers publiés au cours des cinq dernières années, tous pays confondus, et a obtenu le Grand Prix de Cognac ainsi que plusieurs autres prix. Glacé et Le Cercle ont été finalistes du Grand Prix des Lectrices de Elle.

Signes distinctifs : chauve et peu bavard.

Bernartd Minier

Vous pouvez suivre Bernard Minier sur son site 

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Bernie
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Publications: 11138

64 commentaires

  1. Merci Bernie pour cet interview c’est toujours agréable de découvrir un auteur et bien entendu ce désir qu’il a d’écrire, et l’amour qu’il porte à ses personnages, le lecteur les sent lors de sa lecture 🙂

  2. Hello !
    Je ne connaissais absolument pas cet auteur ! Honte à moi haha.
    Merci pour la découverte, je note et je verrai si je vais me laisser tenter !
    Bonne journée.

  3. je ne connais pas cet auteur, je le trouve bien dans sa tête, j’aime sa manière de penser. merci de me l’avoir fait découvrir. bises. celine

  4. désolée, je ne connaissais pas cet auteur et je n’ai rien lu de lui … j’ai une tonne de romans policiers mais beaucoup plus « classiques … dans ton interview, j’ai relevé cette citation qu’il emprunte à steiner « Steiner : « Le carnaval vengeur de la contre-culture voudrait étouffer ce que la pensée comporte inévitablement d’élitiste, d’arrogant, voire d’injuste ». jolie musicalité des mots et beau rythme de la phrase … mais pourquoi exprimer de façon aussi ampoulée une idée qui au demeurant est fort juste .. n’est ce pas en soit une forme d’élitisme et d’arrogance ?
    bisous et bon samedi

  5. Bonjour,
    Comme tu le sais, je ne suis pas roman policier, j’ai honte, je ne connais ce monsieur que de nom, je n’ai rien lu de lui.
    La semaine dernière, je suis allée à la foire du livre, j’ai parlé avec de nombreux auteurs, dont Tatiana de Rosnay, une femme remarquable, simple et très à l’écoute.
    Les autres aussi, j’aime beaucoup Philippe Besson, surprise il était là.
    Merci pour cette interview intéressante.
    Bonne fin de semaine.

  6. remarqué : son déterminisme!et le voyage d’un livre à l’autre qu’il fait faire à ses sujets,

  7. Sympa l’entretien avec Bernard Minier, c’est vrai je ne suis pas très lecteur de policier, mais parfois je me laisse porter., j’en ai écrit un sur le net, mais pas publié.
    Bonne journée
    @mitié

  8. Je ne connaissais pas cet auteur, mais son parcours est formidable !! Bravo et à lui et bonne continuation…
    Merci Bernie pour cette découverte.

  9. Sympa cette interview, Ne lisant pas de policiers, je ne connais pas cet auteur peut-être que je m’y mettrais mais avant cela , lire tous mes livres et j’ai pris beaucoup de retard .

  10. J’adore cet auteur, j’ai dévoré ses livres. Malher non c’est pas celui que j’écoute. Quand à être écartelé, non plus, je m’adapte!

  11. je suis épaté du nombre de livres que tu as lu et que tu envisages de lire !
    Il me semble, depuis tes intervews, que l’ écriture est une passion, tout comme la musqiue classique pour moi.
    Mahler n’ est pas mon préféré, pas plus que Debussy et Stravinsky. préférant les compostions antérieures
    Bonne journée
    Amitié

  12. hello Bernie

    haha je suis en train de lire Le Cercle après avoir lu Glacé 🙂

    l’inspecteur Martin est dingue de Malher 🙂 faudrait que j’écoute quand je trouve un moment, toujours le même problème le temps qui d’ailleurs n’existe pas du tout et ne veut rien dire 🙂

    bonne journée Bernie*
    bises*

  13. Je ne connais pas cet auteur. J’aime assez les romans policiers mais je pense qu’on en est un peu gavés, surtout par les films à la télé.
    Amicalement.

  14. J’aime la phrase si l’écriture ne se construit pas sur une envie, un appétit, un besoin, c’est mort…. bien d’accord avec lui…et non je ne connais pas Malher… merci Bernie !

  15. Il faudrait que j’essaie car je ne suis pas très roman policier, je me suis arrêtée à Agatha Christie. Non je ne connais pas Mahler. Je sais ce que veut dire être écarté entre 2 époques, Ne connaissant pas Bernard Minier je ne puis répondre mais je vais faire un effort et essayer de relire un policier. Bon vendredi !

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